L’artiste de Saint-Epvre Gilbert Lupfer a ouvert hier ses ateliers pour la dix-neuvième fois, à l’occasion de son exposition annuelle. Cette année, adieu le pinceau : le peintre et sculpteur alsacien a joué du crayon.
Il n’aime pas faire les choses comme les autres, Gilbert Lupfer. Depuis hier et jusqu’au dimanche 23 novembre, il a ouvert son exposition annuelle de peinture et de sculpture dans son grand atelier installé depuis 1996 à Saint-Epvre. Mais c’est à la fin de cette huitaine, samedi 22 novembre à 18h qu’il procédera au vernissage. « Dans les ateliers, auparavant, les peintres invitaient leurs clients à voir le travail. Et quand le client aimait bien quelque chose, on revernissait le tableau. On ne vernit pas un tableau tant qu’il n’est pas fini », souligne l’Alsacien de 68 ans.
Dans le dédale de l’ancienne ferme qu’il a entièrement rénové, il y a de quoi vernir. Les créations sont partout, jusqu’au sol, sur les murs bruts et ornant les tables. Une fresque décore d’ailleurs tout un pan du salon familial. « Quelqu’un a déjà voulu l’acheter celle-là, mais impossible de la sortir d’ici ! », sourit son épouse. A vrai dire, l’atelier tout entier est une oeuvre d’art dans laquelle les arcs tracés de Gilbert Lupfer sont les traits d’union aux statuettes qui vous tancent, l’air grave, dès le seuil passé. Car l’homme est autant peintre que sculpteur. « Les gens pensent que la peinture est plus facile et que la sculpture est plus difficile. Mais les deux se valent », estime-t-il.
Ce sont donc statues et peintures qui seront exposées pendant une semaine du côté de Saint-Epvre. Encore que le terme de peinture est quelque peu inapproprié : « Une vingtaine d’oeuvres sont montrées. Mais cette année, j’ai utilisé une technique sans peinture : que du pastel, des pigments, du crayon et de l’encre. »
Des grands formats aux teintes multiples mais douces, toujours selon la sensibilité de Gilbert Lupfer, qu’il qualifie de figuratifs abstraits : « Mon style, poursuit-il, c’est les lignes qui s’entrecroisent. Quand j’étais plus jeune, c’était géométrique. Maintenant, je fais dans la courbe. ». Dans ses oeuvres, les tracés chamarrés semblent s’entrecroiser sans logique, mais révèlent, au gré d’un enlacement et à la faveur d’une imagination fertile, silhouettes animales, regards humains ou formes connues.
D’ailleurs, lorsqu’il pousse une table, qu’il tire un chevalet et qu’il y pose une toile blanche, sa manière de faire en dit long sur la nature de son oeuvre. Tout commence par un coup de crayon dessinant, presque au hasard, quelques traits qui se chevauchent, donnant naissance à un anarchique damier. De cette esquisse naitra une toile, l’artiste donnant à ce quasi-hasard une âme bien ordonnées, et donc bien née.
Tout un imaginaire à découvrir à deux pas d’une autre ligne droite qui change les vies – celle du TGV à peine construit – en ce charmant écrin entre Saulnois et Metz campagne. Bienvenue chez Gilbert Lupfer !
Philippe DERLER